jeudi 16 avril 2009

Délit de solidarité

Bonjour,

Notre ministre de la fermeture des frontières, Eric Besson, dit sur les ondes que le "délit de solidarité" n'existerait pas. Je vous renvoie à mensonge des politiques pour une preuve que ce délit existe bel et bien.
Le ministre préférant nier, le même avocat a établi une belle liste de condamnations pour des raisons des fois plus que ridicules. Petit extrait:
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Bon, me dira-t-on, j'ai trouvé UNE décision qui avait échappé au ministre, la belle affaire.

Une, vraiment ?

Héberger chez soi, pour des motifs humanitaire, des étrangers sans papiers constitue le délit, les mobiles humanitaires, incontestables, étant simplement une circonstance atténuante pour le prononcé de la peine : Cour d'appel d'Agen, 13 oct. 1994, inédit.

Le prévenu, exerçant une activité de marabout, a accepté d'héberger un étranger en situation irrégulière. Il était parfaitement informé de la situation administrative de cet étranger car il était, comme lui, demandeur d'asile débouté et parfaitement informé des conditions de séjour des étrangers en France ; il est donc coupable : Cour d'appel de Limoges, 3 nov. 1993, inédit.

Il appartient au gérant d'un hôtel meublé de s'assurer de la régularité de la situation des étrangers qu'il héberge durant la période d'hébergement au risque de se rendre coupable d'aide à immigration clandestine. Sa responsabilité pénale n'est pas limitée aux locataires en titre mais doit être étendue aux locataires clandestins dont il est établi que le prévenu connaissait la présence sur les lieux et contre laquelle il s'est délibérément abstenu d'intervenir ( Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 5 nov. 1992). L'aide peut donc se faire passivement.

Une personne qui aide une prostituée à se livrer au commerce de ses charmes commet le délit de proxénétisme ET d'aide au séjour irrégulier : Cour d'appel de Paris 10e ch. B., 19 déc. 1990).

Deux membres d'une association ayant aidé et hébergé à leurs domiciles des étrangers en situation irrégulière ont été dispensés de peine. Sous couvert de préoccupations humanitaires, les deux ressortissants français ont prêté leur concours « de manière fort imprudente » à des opérations de transferts de fonds destinées au financement du passage à destination de la Grande-Bretagne de nombreux clandestins et ont à plusieurs reprises hébergé à leurs domiciles des réfugiés dont ils n'ignoraient pas la situation irrégulière. Le tribunal relève que ni l'un, ni l'autre ne se sont personnellement enrichis. Dispense de peine. ( T. corr. Boulogne-sur-Mer, 19 août 2004, no 1178/2004). Je pense que ce sont les deux cas auxquels M. Besson faisait allusion sur France Inter.

Monsieur Besson nie également que transporter un étranger en auto-stop puisse en soi constituer le délit. En effet, sur l'auto-stop, je n'ai pas trouvé de jurisprudence. Mais…

Cour de cassation, chambre criminelle, arrêt n°03-08328 du 21 janvier 2004 : confirme la condamnation d'un chauffeur de taxi qui conduisait des clients qu'il savait être clandestins à Dunkerque, Marquise ou Boulogne Sur Mer. Il est établi qu'il ne faisait partie d'aucun réseau. Il ne leur facturait que le tarif normal de la course. 2 ans de prison avec sursis, 2 ans d'interdiction d'exercice de la profession, de taxi.

Cour de cassation, chambre criminelle, 12 mai 1993, n°92-82779 : condamnation du conducteur du véhicule ayant transporté un étranger sans papier lors de son franchissement de la frontière.

Le simple fait de porter les bagages d'un étranger qui franchit la frontière par ses propres moyens constitue le délit : Cour d'appel de Grenoble, 29 sept. 1989, inédit.

Ça devient parfois assez gonflé, quand l'aide à la circulation recouvre… l'aide à quitter le territoire : l'aide apportée, en connaissance de cause, à un étranger en situation irrégulière en France, pour lui permettre de quitter le territoire français sans effectuer les contrôles de police nécessaires s'analyse comme l'aide au séjour irrégulier d'un étranger ( Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 27 juin 1994).

Le chef de poste de la police de l'air et des frontières dans un aéroport, qui malgré la décision de non-admission sur le territoire français prise à l'encontre d'une étrangère, la fait illégalement sortir de la zone de non-admission, l'installe dans un hôtel pendant deux nuits en payant les frais avant de l'accompagner dans une gare où il lui fait don d'une somme d'argent pour lui permettre de prendre le train, se rend coupable du délit d'aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irréguliers d'un étranger en France et ne saurait se retrancher derrière le but humanitaire de son geste ( CA Paris, 3 janv. 1994). La cour dit expressément que le mobile humanitaire est indifférent à la culpabilité.

Ajoutons que jusqu'à la loi du 26 novembre 2003, se prêter à un mariage blanc pour permettre à son faux conjoint d'obtenir des papiers était une aide au séjour. C'est devenu un délit autonome… puni exactement des mêmes peines (art. L.623-1 et s. du CESEDA). Bref une disposition légale totalement inutile.

Et pendant qu'on y est, M. Besson nous parle de 4500 arrestations aboutissant à 1000 condamnations. Soit un ratio d'une condamnation pour 4,5 interpellés, qui est très mauvais. Qui sont les 3500 qui restent ? Des erreurs judiciaires ? Parce que ça veut dire qu'on place chaque jour en garde à vue 10 innocents, ou du moins des personnes qu'on ne juge pas utile de poursuivre ou à l'encontre desquelles il n'y a pas de preuve.
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